Voici un article sur l’un des aspects du deuil, le désencombrement dans la série 3 décès et 2 déménagements.
En juillet dernier, lorsque les gens me demandaient comment je vivais le deuil du décès des trois membres de ma famille, je les regardais à chaque fois avec un point d’interrogation dans les yeux. Mon deuil ? Comment j’allais ? Je n’étais pas encore rendue là. J’étais encore dans l’aspect «organisationnel» de la perte de mon père, ma mère et ma marraine.
Un long processus
Quelques mois auparavant, en février, comme je savais que j’allais déménager dans plus petit à Montréal, j’avais entamé avec passion un processus de désencombrement à la manière de Marie Kondo. J’avais opté pour la méthode Konmari qui consistait à passer en revue chaque objet de mon appartement avec la question qui tue :Est-ce que cette chose m’apporte de la joie ? Ouf. Au départ, je ne croyais pas à y arriver. Et pourtant, pourtant…. J’y suis arrivée et j’ai aimé ça ! Tellement, qu’ensuite, j’ai commencé à recommander son livre à toutes mes clientes.
Durant le processus, de février à mai, tout y était passé. Mes vêtements, livres, paperasse et objets de toutes sortes. Lors du processus, j’avais du même coup trié les objets que j’avais récupérés à la suite du décès de mon père. Avec ma fille, j’avais même passé un week-end à trier nos souvenirs : photos, dessins, cartes de souhaits etc. Étonnamment, nous avions adoré faire ce processus. J’étais fière de moi, de nous. C’était comme repartir sur de nouvelles bases, élaguer le superflu, ne garder que ce qui était essentiel à nos vies ou qui nous apportait de la joie. Nous avions fait de l’espace pour notre future vie montréalaise. Yé !
Mais par la suite, 3 semaines avant de déménager, ma mère et ma marraine sont décédées à 5 jours d’intervalle, et j’ai dû recommencer le processus avec les objets de ma marraine. NON !!!! Moi qui venait à peine de vider ma maison par la porte arrière, elle se remplissait par la porte avant. Et lors de cette 2e ronde de désencombrement, j’ai réalisé à quel point il est encore plus dur de le faire avec les objets des autres.
Je me suis donc retrouvée à trier, recycler, donner, jeter les objets de ma marraine. Je savais qu’elle aimait bien garder une trace de sa vie, de la mienne ainsi que de celle de ma famille élargie. Mais lorsque je suis allée vider sa maison, j’ai retrouvé une dizaine de boites. Je me serais crue à la Grande Bibliothèque de Montréal… euh, de Lawrenceville….
Pas besoin d’être une ramasseuse compulsive pour s’y mettre…
Ma tante n’était pas une ramasseuse ou une collectionneuse. Elle n’avait pas tant d’objets que ça. De son vivant, lorsque j’allais chez elle, je trouvais toujours que sa maison était impeccable, bien rangée, avec peu d’objets. Mais lorsque tout à coup, je devais en disposer, j’ai senti le poids des objets. J’ai senti que je devais en faire quelque chose. Les honorer. Les conserver. Les donner aux bonnes personnes. Garder ce que je devais garder pour ne pas regretter plus tard. Donner à ma fille ce qu’elle aimerait avoir plus tard. C’était une lourde tâche sur mes épaules.
Alors, dans sa petite maison, dans les placards et dans son bureau j’y ai trouvé des lettres, des cartes, des dessins d’enfants de ma fille, de ma cousine Martine et de moi datant de 1973, ses bulletins du primaire datant de 1949, son diplôme de catéchisme, beaucoup de photos … de moi, de ma fille, de mes grands parents et de mes petits, petits, petits cousins de la fesse gauche que je n’avais jamais rencontrés. Mais telle une bibliothécaire chevronnée, TOUTES les photos étaient identifiées au verso avec le nom de chaque personne. Il y avait également des documents de généalogie, des livres de latin, des méthodes pour DOS (programme d’ordinateur des années 80). Également, une quinzaine de tasses de collection.
Aux funérailles, toute la famille élargie était là alors j’en ai profité pour donner à mes petites cousines quelques tasses de sa collection ainsi que les courtepointes faites par ma grand-mère et laissées à ma marraine à son décès. J’ai gardé deux tasses et deux courtepointes pour ma fille et moi. Ayant grandi avec mes grands-parents, c’était très émouvant pour moi. En les donnant, je voyais dans ma tête ma grand-mère qui piquait dans le salon la courtepointe avec comme bruit de fond le hockey que mon grand-père regardait dans la pièce voisine. C’est une partie de mon enfance qui s’en allait. J’ai aussi gardé le banc de piano et une vieille radio Telefunken que nous avions au chalet et qui me rappelle aussi mon parrain. Je me suis dit que ce n’était pas la quantité qui comptait mais bien d’honorer et d’utiliser les quelques objets que j’allais garder.
Marie Kondo insiste sur l’importance d’honorer les objets. Si je n’avais pas lu son livre, je ne crois pas que j’aurais pris le temps de donner aux bonnes personnes des souvenirs de Ghislaine et d’ainsi honorer sa vie. Je me serais sentie obligée de tout conserver. J’aurais simplement entreposé toutes ces boites, sans peut-être jamais y retourner pour les regarder.
Un nouveau rapport aux objets
Comme l’explique Marie Kondo, je sens que mon rapport aux objets n’est plus le même. Je me sens maintenant plus légère. Et je sens que toute cette gestion d’objets m’a aidé en quelque sorte à faire mon deuil. En regardant, lisant, touchant les souvenirs et les objets, j’ai vu ma vie défiler dans ma tête. Et lorsque j’ai donné, vendu, jeté, j’ai fait de la place pour ce que j’ai envie de vivre maintenant.
Pensons à nos enfants.
L’une des plus belles prises de conscience a été celle-ci. Suite à ce long processus, j’ai décidé de ne pas faire vivre cela à ma fille. Je vais donc essayer de «classer ma vie» au fur et à mesure….
PS. J’ai commencé à accompagner en coaching celles qui souhaitent démarrer un processus de désencombrement à la suite d’une séparation ou d’un deuil. Comme vous l’avez vu, il n’est pas nécessaire d’être très embourbée sous les objets pour le faire, simplement souhaiter alléger sa vie et faire de la place pour la nouvelle vie.